Tagué: 17ème siècle

Sources littéraires et iconographie

En 2001, Stéphane Lojkine et Benoît Tane ont créé la base de données Utpictura 18. (pour accéder à la présentation du site : cliquez ici, et pour connaître l’histoire développée du site : cliquez ici). Ils sont, entre autres (ils accumulent les titres), professeurs de littérature en université. Vous pouvez accéder à leur parcours et publications : la page de Stéphane Lojkine et la page de Benoît Tane.

On pourrait alors s’étonner de les voir entreprendre une base de données d’images en histoire de l’art. Et pourtant le lien qu’ils ont fait entre leur discipline d’origine et notre domaine est bien là.

Ils sont partis des sources littéraires qui sont à l’origine de l’iconographie pour nous dévoiler les œuvres. Ils ont eu l’ingénieuse et inédite idée de regrouper tous les éléments de leur corpus selon leurs origines textuelles. Ainsi, par exemple, toutes les œuvres ayant pour le thème le reniement de saint Pierre sont regroupées. Mais plus précisément et ce qui fait l’intérêt majeur de cette ressource : selon des textes précis. L’épisode du reniement de saint Pierre est mentionné dans différents textes fondateurs comme l’Evangile de Luc : le site donnera donc la possibilité de consulter toutes les œuvres ayant un rapport iconographique avec l’Evangile de Luc.
La découverte peut se faire aussi du côté inverse, au sens où on l’on peut partir du Reniement de saint Pierre de Georges de La Tour, par exemple, pour pouvoir connaître les sources textuelles principales : l’Evangile de Matthieu, de Luc et de Marc. La fiche d’identité de l’œuvre est toujours donnée. Mais ce qui donc important dans cette ressource c’est que l’œuvre soit mise en relation avec d’autres œuvres, de tout horizon, selon : les sources textuelles, le sujet, la nature de l’œuvre, son lieu de conservation, son auteur, sa datation ; et parfois même selon un objet indexé dans l’image et une bibliographie associée à l’œuvre ou l’auteur. Toutes ces possibilités sont regroupées dans l’œuvre de de La Tour. On est tout de suite mieux et davantage informé sur l’œuvre si l’on peut la relier à une source textuelle précise : on saura immédiatement où chercher des éléments de son iconographie, et si l’on peut connaître les autres thèmes donnés par cette même source textuelle.
Par ailleurs, au bas de l’œuvre est donné l’historique de l’œuvre quand il est connu et surtout se trouve un conseil de mise en relation avec une autre œuvre qui est forcément une contribution intéressante.
A savoir : les images sont reprises directement aux musées qui détiennent les œuvres originales et sont créditées d’un droit d’auteur, il est par conséquent impossible de les enregistrer ou de les copier.

Utpictura18

Bien sûr, le site présente d’autres axes de recherches dont certains sont rares et intéressants. Par exemple, il est possible de consulter leur contenu d’images par siècle ou demi-siècle (cliquez ici pour ce type de recherche). Ils détiennent des numérisations d’œuvres du début du 13ème siècle jusqu’à la moitié du 19ème siècle. Les siècles les plus fournis étant ceux du 16ème, du 17ème et du 18ème.

L’interface n’est pas des plus attirantes du point de vue esthétique pur mais reste néanmoins intelligemment constituée. Il est facile d’accéder aux différents pôles de recherche : une recherche basique (auteur/titre), une recherche nuancée (type d’œuvre/ un ou plusieurs mots) ou une recherche très développée (« menus déroulants »).

Pour ceux qui s’intéressent à l’iconographie, à la littérature ou aux représentations qui y sont liées, le site donne la liberté à qui veut de s’exprimer sur la page Commentaires récents.

Anna

Martyre de saint Pierre de Giordano : en vidéo

Luca Giordano, Martyre de saint Pierre, huile sur toile, 173x222 cm, Ajaccio, Musée Fesche, musée fesch

A Ajaccio, le musée Fesch détient quelques représentations intéressantes de saint Pierre dont l’huile sur toile de Giordano. Vous pourrez en consulter d’autres relevées dans notre flick’R.

D’ailleurs, si vous désirez connaître davantage les collections de ce musée cliquez ici.

La page personnalisée au Martyre de saint Pierre par le napolitain Giordano (1632-1705)  est plus intéressante que les autres car est postée une vidéo créée par Marie-Anne Andreani, pour le musée corse. La vidéo dure environ 5 minutes.

Sur fond de chants chrétiens, une voix féminine s’applique à un début d’analyses formelle et iconographique (pour reprendre l’ordre établi par Panofsky). Comme souvent, elle va mettre en avant l’humilité du saint.

Elle commence par rappeler le contexte de la crucifixion du saint : cela se passe en l’an 65 à Rome. Elle choisit la version selon laquelle Néron, suite à l’incendie qui ravagea la ville, désigne les chrétiens comme coupables, et, parmi les 200 qu’il fait arrêter, se trouve saint Pierre.

Grâce à des outils numériques, une grille se déplace sur l’œuvre et dévoile une symétrie qui prend comme axe la croix (et donc le corps du saint). Elle se révèle par les différents visages qui composent la toile. Cela montre comment il est possible de créer une ambiance à la tension forte, donnée par  l’action même et par une impression d’instabilité (l’axe de symétrie coupe la toile en diagonale), tout en maîtrisant évidemment absolument la composition.

Par la suite, elle nous donne des conséquences du choix du clair-obscur. La vidéo, par ce rappel basique, prouve nettement sa volonté d’être accessible à tous. Il ne faut  pas voir dans ce propos un mépris vis-à-vis de la notion de « grand public » ou de son observation, mais plutôt le fait que cette vidéo ait la caractéristique de vouloir être accessible à l’étudiant en première année d’histoire de l’art ou à tout amateur débutant dans le domaine.

Cette lumière crue (et mise en évidence par le contraste du clair-obscur) veut faire surgir le martyre selon Andreani : elle fait ressortir le corps blême du martyr et le visage de celui qui va martyriser. C’est l’acte de martyre qui est forte ici, plus qu’une simple crucifixion ou un caractère humble. C’est en effet indispensable de ne jamais oublier que la notion de martyre dans la figure de saint Pierre et dans la religion catholique est très importante et se veut un modèle à suivre (dans le but de parvenir au salut éternel).

Elle va également lier l’idée de l’humilité du martyr à celle de la représentation formelle anti-idéaliste qui passerait par des « détails triviaux » tels que les pieds sales de saint Pierre et le sang qui afflue au visage.

Elle termine son commentaire en faisant le lien entre le tombeau de saint Pierre et la Basilique saint Pierre de Rome construite sur l’emplacement de celui-ci. Le tout sur le chant liturgique, très adapté à l’atmosphère, qui en crescendo dit : « Amen ! Amen ! Amen ! ».

Bien que le contenu de l’analyse puisse être sans doute discuté, comme souvent lorsqu’il s’agit d’interprétation, poussée ou non, il est souvent agréable d’avoir à la découvrir sous le format d’une vidéo, ce que ne proposent pas toujours les musées. Cela donne un aspect interactif bien sûr mais permet aussi des zooms et d’y appliquer les outils numériques d’analyse formelle en synchronisation avec la voix du commentateur.

Stella

NGA: National Gallery of Arts à Washington : tout y est !

atelier de rubens, saint pierre, 1616-1618, huile sur toile, 92x67.5cm, timken collection, nga - Copie

nga

Une des premières choses qu’on apprécie en visitant ce site américain est, tout simplement, l’interface : tout est clair, centré, propre, élégant, minimaliste en quantité d’informations, de couleurs, de calligraphies, de logos etc. L’avantage d’un musée tel que celui de la National Gallery of Arts est qu’il n’a pas à infliger aux visiteurs une publicité,  qui, quelle qu’elle soit, est pollution visuelle. De fait,  il eut été contradictoire que le site d’un des plus imposants musées mondiaux négligeât son apparence.

Mais ce qui est encore plus réjouissant est que tout est scrupuleusement et minutieusement composé. Prenons en exemple deux représentations iconiques de saint Pierre : la première, datant du 15ème siècle, par l’italien Marco Zoppo et la seconde, datant du 17ème siècle, par l’atelier de Rubens. Comme pour toutes les autres œuvres répertoriées, on trouve :

–          L’image agrandie (possibilité assez courante)

–          La fiche de l’artiste qui mène vers sa biographie détaillée et bien construite, vers une bonne bibliographie sélective le concernant et vers d’autres de ses travaux.

–          Une autre bibliographie consacrée maintenant à l’œuvre, rangée chronologiquement. C’est une source plus rare pour des recherches et, selon les œuvres, plus ou moins précieuse.

–          La provenance de l’œuvre.

Si le visiteur éprouve quelque question, il semble que la page « help » lui est entièrement dédié et le satisfera sûrement.

Si vous voulez continuer à vous familiariser avec l’iconographie de saint Pierre, le musée ne détient pas seulement ces deux seules représentations, vous en trouverez d’autres où le saint fait partie d’un ensemble qui n’appartient pas à ses représentations dites narratives (par exemple : Chez la Madone à l’enfant de Bartolo que saint Paul et lui entourent) ou d’autres simples numérisations comme Saint Pierre en prison par Lievens.

On aura donc vu à quel point le site maîtrise sa base de données très bien fournie de manière très complète et précise, aidée par une interface à laquelle il est facile de s’habituer. Mais aussi, d’une manière qui semble chercher à satisfaire les recherches de tout étudiant débutant en histoire de l’art !

Catherine